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Lettre ouverte à la chaîne « Al-Jazeera »

Monsieur le Directeur Général de la chaîne « Al-Jazeera »,

Nous exprimons nos regrets que les choses aient évolué au point de contraindre les autorités marocaines à retirer les accréditations des journalistes de la chaîne « Al-Jazeera » et à suspendre les activités de son bureau à Rabat.

Tout en vous réaffirmant notre reconnaissance du rôle important joué par la chaîne « Al-Jazeera » dans le domaine des médias arabes, sa couverture de nombreux événements et régions du monde, ainsi que sa contribution au développement d’un débat entre les composantes de la société arabe et islamique, nous tenons, en vertu du devoir de la fraternité sincère et du conseils constructif, à vous faire part de nos reproches à l’égard de plusieurs erreurs professionnelles et éditoriales qui ont entaché vos couvertures des questions marocaines en particulier.

Ainsi, nous relevons avec beaucoup de regret que la chaîne « Al-Jazeera » a focalisé systématiquement, dans ses couvertures des questions marocaines, sur les seuls aspects négatifs, qui, quoique existants et ne pouvant être niés, ne pourraient en aucun cas éclipser les progrès notables réalisés par le Maroc dans les domaines notamment des libertés publiques, des droits de l’Homme, du développement humain, de l’ouverture économique et de l’élargissement de la participation politique. Or, les journalistes d’« Al–Jazeera » assurant la couverture des questions marocaines ne consacrent que peu de d’intérêt à ces progrès.

Si les indicateurs de la liberté économique, de la liberté politique et des progrès réalisés sur le plan des droits de l’Homme placent le Maroc au premier rang des pays arabes, force est de relever que le téléspectateur arabe, qui a pour source d’informations la chaîne « Al-Jazeera », ne connait que peu de choses sur ces progrès. Pire, on lui brosse un tableau sombre du Maroc, comme s’il était au bord du gouffre ou sur le point de s’effondrer.

Eu égard à cet état de fait, nous ne pouvons que déduire que ce choix éditorial négativiste, marqué par une sélectivité abusive, trahit une certaine vision politique qui n’accorde d’importance qu’à ce qui est opposant, négatif ou nihiliste, malgré le fait que ces expressions ne reflètent qu’une petite frange du paysage social et politique marocain.

De plus, nous relevons que la couverture réservée par « Al-Jazeera » à la question du Sahara est totalement déséquilibrée et souffre d’un manque flagrant de professionnalisme, d’impartialité et d’objectivité, requis d’une chaîne ayant une large diffusion comme c’est le cas de la chaîne « Al-Jazeera ».

Les journalistes de la chaîne « Al-Jazeera » ne font que renvoyer, de manière flagrante, les positions et les thèses du « polisario » sans aucune analyse ou critique, alors, qu’au même moment, soit ils occultent les thèses et les positions du Maroc, soit ils les présentent sous un angle réduit en leur consacrant beaucoup de critiques, au point que les journalistes de la chaîne « Al-Jazeera » semblent être parties au différend.

Nous ne demandons pas de la chaîne « Al-Jazeera » d’épouser la position constante du peuple marocain à l’égard de son intégrité territoriale, mais aspirons à ce que sa couverture soit équilibrée et tienne compte de tous les points de vue, en particulier celui du peuple marocain attaché à son Sahara.

Ainsi, nous avions suivi avec beaucoup de surprise la couverture détaillé, exhaustive et quotidienne réservée par la chaîne « Al–Jazeera » à l’affaire d’Aminatou Haïdar, qui avait été refoulée par les autorités marocaines en dehors du Maroc et avait mené une grève de la faim, alors que la chaîne « Al–Jazeera » avait adopté un silence douteux à l’égard de la question de Mustapha Salma Ould Sidi Mouloud, qui avait exprimé sa position politique par rapport à la proposition marocaine d’autonomie dans le Sahara et avait décidé de retourner dans les camps de Tindouf, en territoire algérien, pour exprimer son opinion et avait alors été enlevé par le « polisario », emprisonné, voire torturé.

L’opinion publique marocaine et internationale s’est mobilisée pour soutenir M. Mustapha Salma Ould Sidi Mouloud dans cette épreuve, a appelé à sa libération et a tenu l’Algérie responsable de la garantie de son intégrité physique et de son droit à la liberté et à l’expression libre de ses opinions.

Toutefois, la chaîne « Al-Jazeera » n’avait accordé aucun intérêt à cette mobilisation, voire ne lui a assuré aucune couverture. Cet agissement ne dévoile-t-il pas, Monsieur le Directeur Général, une position politique et une complicité médiatique avérée ? Cet agissement ne signifie-t-il pas que la chaîne « Al-Jazeera » fait siennes les positions du « polisario » et de l’Algérie sur la question du Sahara ?

D’autre part, nous relevons que la chaîne « Al-Jazeera » réserve des couvertures exhaustives aux questions de droits de l’Homme au Maroc et rapporte de manière détaillée les rapports d’organisations internationales sur la situation des droits de l’Homme, alors qu’elle ignore, de manière préméditée semble-t-il, les rapports publiés par des organisations internationales des droits de l’Homme sur la situation des droits de l’Homme et les droits des réfugiés dans les camps Tindouf.

Comment est-il concevable que la chaîne « Al-Jazeera » puisse ignorer le fait que les sahraouis séquestrés à Tindouf ne bénéficient pas, depuis 35 ans, de leurs droits en tant que réfugiés, stipulés par la Convention de Genève de 1951 et son Protocole additif de 1967, consistant notamment en leurs droits de circuler, de travailler, d’avoir une identité, d’être recensés et d’exprimer leurs opinions politiques ; lequel fait avait été relevé par les rapports d’organisations internationales des droits de l’Homme, alors que la chaîne « Al-Jazeera » se satisfait de passer au peigne fin toutes les questions relatives aux droits de l’Homme au Maroc ?

Enfin, ligne éditoriale de la chaîne « Al-Jazeera » divise le paysage politique marocain en trois pôles : des partis nationaux, des partis amazighs et des paris islamistes ; laquelle classification est fondamentalement erronée et sans aucun lien avec la réalité, car ne se basant sur aucune étude ou analyse de la situation politique au Maroc.

Cependant, même si nous acceptons cette classification erronée, la couverture de la chaîne « Al-Jazeera » des questions politiques se fait souvent à travers le prisme du point de vue islamiste. Ce qui signifie que les positions des partis nationaux et amazighs sont appréhendées avec beaucoup de sélectivité.

Personne ne nie que la ligne éditoriale de la chaîne « Al-Jazeera » courtise et flatte les islamistes, mais aller jusqu’à couvrir un large éventail des questions marocaines à travers le prisme du point de vue islamiste, qui représenterait que 15% de l’opinion publique marocaine si nous adoptons les résultats des élections législatives de 2007 comme référent, constituerait une grande injustice, dévoilerait l’approche subjective et mettrait l’intention délibérée et préméditée d’être partial.

Tels sont les reproches que nous vous faisons, Monsieur le Directeur Général, en toute fraternité, sincérité et franchise. En faisant ceci, nous ne tentons pas de justifier l’interdiction, mais nous entendons vous avertir à la nécessité de faire preuve de courage, en procédant à un exercice d’autocritique et à une révision objective de l’approche adoptée jusqu’à présent, dans l’espoir que le brouillard se dissiperait et que les choses reviendraient à la normale dans un proche avenir.

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur Général, l’expression sincère de mon respect et considération.

Lahcen Haddad

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