Lors de la conférence organisée par le Mouvement Populaire sur “La politique du gouvernement, entre les contraintes des équilibres macro-économiques et les défis de la croissance”
M. Mohand Laenser : La nécessité de rechercher la vérité en approfondissant le débat et en s’éloignant des surenchères politiciennes
M. Nizar Baraka : En dépit de la crise mondiale, le Maroc a recueilli la confiance des institutions financières internationales
M. Ahmed Rahou : Appel à reconsidérer les prêts bancaires en vue d’équilibrer l’investissement
M. Mohamed Fikrat : La nécessité de faire de la production un levier essentiel de notre économie
M. Simon Gray : Le Maroc est tenu d’élaborer une structure économique entrepreneuriale en vue de rattraper le déficit
Le Mouvement Populaire a organisé, vendredi dernier à Rabat, une conférence sous le titre "La politique du gouvernement, entre les contraintes des équilibres macro-économiques et les défis de la croissance".
Le Mouvement Populaire a pu, à travers cette conférence anticipative face à la situation économique urgente de notre pays, engendrée par des facteurs exogènes et endogènes, ouvrir un débat national sur notre situation économique.
A cet égard, M. Mohand Laenser, Secrétaire Général du Mouvement Populaire, a souligné que cette conférence est l’occasion de lancer un débat serein en vue de cerner la situation réelle de notre économie, actuelle et future, loin des surenchères politiciennes et avec pour finalité de parvenir à des solutions opérationnelles avec des pertes minimales.
Au regard du caractère économique de cette conférence, l’exposé principal a été présenté par le ministre de l'Economie et des Finances, M. Nizar Baraka, qui a exposé la situation économique du pays dans toutes ses dimensions, en énumérant les raisons et les causes qui ont fait que le Maroc fait face à cette crise.
M. Baraka a cité parmi les raisons à caractère exogène les répercussions de la crise financière mondiale qui s’est déclenché depuis 2008 et a impacté les économies mondiales les plus puissantes, soulignant que l'économie de notre pays a fait toutefois preuve de résilience face à cette crise, mais la crise mondiale s’est poursuivie jusqu'à ce jour, ce qui a fait que notre économie a été également impactée.
Le ministre de l'Economie et des Finances a indiqué que les raisons de la situation économique actuelle critique résident dans la récession que connaissent les économies de nos deux partenaires économistes privilégiés, la France et l’Espagne, estimant toutefois que le plus grand impact a été à été celui de la facture de nos importations énergétiques, en plus de la Caisse de Compensation.
M. Baraka a souligné toutefois qu’il demeure toujours une lueur d'espoir, sans laquelle les institutions financières internationales n’auraient pas renouvelé leur confiance dans l'économie nationale, en accordant à notre pays des prêts sans précédent pour le financement de notre économie, ajoutant que le Maroc a pu mettre en place une infrastructure industrielle qui a donné ses fruits malgré la conjoncture financière mondiale critique avec un taux de croissance d’environ 16%, outre le secteur prometteur des énergies renouvelables, qui devrait relancer notre économie au cours des prochaines années.
Le ministre de l'Economie et des Finances a certes reconnu qu'il y une crise financière, soulignant toutefois que la seule solution est d'ouvrir un débat national afin de mettre les points sur les « i » avant que cette crise ne dégénère, d'autant plus que nous disposons d’une grande marge de « manœuvre économique » vue que le Maroc pourrait s’orienter vers les marchés africains et qu’il pourrait également renforcer son partenariat avec les pays du Golfe, en plus de la mise en œuvre d'autres solutions opérationnelles.
Pour sa part, M. Mohamed Fikrat, représentant de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), a affirmé que la crise financière mondiale à laquelle fait face le monde entier nous met devant un choix unique, celui de rechercher la croissance à travers la production selon les normes en vigueur mondialement, c’est à dire à travers une production ayant une qualité acceptable et avec des prix abordables, en vue pour de gagner le pari de la compétition mondiale.
Dans ce cadre, le représentant de la CGEM a souligné la nécessité d’adopter une nouvelle approche économique, à travers la création d’une « culture entrepreneuriale » qui soit un levier essentiel pour la promotion de notre économie, évoquant l'exemple d’un secteur qui est à la fois ancien et nouveau, à savoir le secteur du textile qui génère des revenus financiers de plus de 33 milliards de dirhams et pourrait générer davantage s’il est restructuré et traité selon une approché nouvelle et renouvelée.
Pour sa part, M. Ahmed Rahou, Président Directeur Général du Crédit Immobilier et Hôtelier (CIH), a souligné la nécessité de faire des rapprochements entre l'économie réelle et l’économie virtuelle, lesquels rapprochements économiques se sont imposés avec le déclenchement de la crise financière américaine, lorsqu’on a parlé à l’époque, c’est à dire l'année 2008, d’une économie américaine à deux vitesses, engendrées par certaines banques d’investissements qui financent et contrôlent parfois la production. Ce qui a fait que l'économie américaine s’est affaissée et avait entraîné dans sa chute plusieurs économies mondiales.
Au sujet de la situation économique nationale, Président Directeur Général du CIH a estimé qu'il est possible de réaliser des investissements en se basant sur l'épargne bancaire à travers un plan d’investissement bancaire contrôlé par la banque centrale, Bank Al-Maghrib, en vue d’assurer le financement et l’accompagnement nécessaires pour réaliser l'objectif escompté.
M. Rahou a conclu en affirmant que l'investissement sur la base de l’épargne bancaire nécessite la restructuration de certaines institutions et la reconsidération des prêts accordés par les banques en vue de financer la compensation, parce que les faits indiquent que les prêts destinés à l'investissement dans le secteur de l'immobilier, par exemple, sont très élevés par rapport à d'autres investissements qui pourraient dynamiser le cycle économique. M. Rahou a également évoqué la question de la régulation des importations en accordant la priorité aux produits essentiels.
Interpelé par M. Larbi Jaïdi, qui a animé la conférence et qui s’est interrogé sur le scénario de la révision du taux de change du dirham hypothèse à travers la révision des pondérations du panier des devises, M. Rahou a répondu par la négative, faisant signifier que la question de la dévaluation du dirham n'est pas pertinente.
La dernière intervention a été celle de M. Simon Gray, Chef du Département Maghreb à la Banque Mondiale, qui a donné tout d'abord un aperçu sur l'économie mondiale, soulignant que l'économie marocaine est une économie mondialisée et devrait donc de ce fait être placée dans son contexte naturel ; un contexte qui vit une crise financière depuis 5 ans et qui a généré une crise économique qui a affecté les économies mondiales les plus puissantes, dont notamment les économies européennes. Ces dernières ont impacté, d'une façon ou d'une autre, l'économie marocaine, ce qui a donné lieu à un déficit jumeaux, un déficit de la balance des paiements et un déficit budgétaire.
Le représentant de la Banque mondiale a mis en garde contre les conditions économiques environnantes, soulignant toutefois qu'il existe des solutions opérationnelles, consistant en l’élaboration d’un nouvel ordre économique basé sur une structure entrepreneuriale solide et précisant que cela exige l’approfondissement des réformes en vue de promouvoir les investissement à moyen et long terme.
M. Gray a indiqué que la période 2013-2015 sera décisive pour l'économie marocaine, précisant toutefois que les solutions sont disponibles et que la marge des réformes reste grande, sans lesquelles ne se serait pas poursuivi l’accompagnement par les institutions mondiales des réformes économiques au Maroc.
Après ces exposés qualitatifs, qui ont placé l'économie marocaine dans son contexte mondial et régional, le débat a été ouvert, qui est venu confirmer les idées soulevées lors de cette conférence économique.
Le débat a couplé entre des questions brûlantes sur la situation économique nationale, des suggestions pratiques pour la promotion de notre économie, et d'autres idées reflétant un esprit citoyen, telles que l'économie d'énergie à travers le délestage de l'électricité une heure chaque soir, l’incitation des investisseurs parmi la communauté marocaine résidant à l’étranger et la réorientation vers de nouveaux marchés tout en préservant nos partenaires traditionnels.
Ce débat a conclu que les solutions à la crise économique sont possibles, à condition de s’éloigner des surenchères politiciennes gratuites qui entravent les réformes.