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M. Sentissi : Le projet de loi de finances 2025 comporte des chiffres et des indicateurs très optimistes et irréalisables

M. Driss Sentissi, Président du Groupe Haraki à la Chambre des Représentants, a estimé que la nouvelle mouture du gouvernement ne constitue qu’un « simple remaniement technique » au vu du fait que le programme gouvernemental est dépassé, affirmant que « le véritable remaniement que nous attendions était une révision de l’architecture du gouvernement et du programme gouvernemental et soulignant que les défis du contexte, les aspirations des citoyens et des citoyennes et leurs voix qui se sont élevées en raison de la hausse des prix et du déficit hydrique ont prouvé qu’il s’agit d’un remaniement qui intervient en dehors du cadre de l’horizon stratégique que le Royaume a été établi grâce à la sage Vision de Sa Majesté le Roi ».
Dans une intervention lors d’une séance tenue hier vendredi par la Commission des finances et du développement économique, dans le cadre de la discussion générale du projet de loi de finances 2025, M. Sentissi a appelé à la présentation d’un programme gouvernemental rectificatif qui accompagne les récents développements et met la nouvelle composition face à l’incapacité à tenir les engagements du gouvernement s’agissant de réaliser un taux de croissance de 4% pendant cinq ans alors que ce taux n’a pas été atteint tandis que nous en sommes à la quatrième année du mandat de ce gouvernement, de créer un million d’emplois nets alors que nous sommes face à la perte de 500.000 emplois au lieu, d’augmenter le taux d’activité des femmes à plus de 30% au lieu de 20% alors que ce taux n’est actuellement que de 19%, de sortir un million de familles de la pauvreté et de la vulnérabilité alors que cela n’a pas été atteint et qu’il est possible que c’est le contraire qui s’est passé – les résultats du recensement général nous éclaireront à ce sujet- , de réduire les disparités sociales à moins de 39%, de classer le Maroc parmi les 60 meilleurs pays au monde en matière de système éducatif (nous sommes aujourd’hui 154ème au classement mondial) et de mettre en œuvre le caractère officiel de la langue amazighe.

A cet égard, M. Sentissi a affirmé « nous ne sommes pas une opposition du dénigrement et de remise en doute comme certains le prétendent. Certes, il y a des réalisations que seule une personne ingrate peut nier, mais ce sont des réalisations qui sont essentiellement et à l’origine le fruit de Hautes initiatives Royales malgré leur mauvaise mise en œuvre par le gouvernement », ajoutant que « depuis le début, nous avons averti le gouvernement qu’il manquait de créativité et d’innovation, qu’il s’est distingué par la distribution de la richesse – quoique ténue – plutôt que par sa production et qu’il était incapable de mettre en œuvre la politique générale de l’Etat, notamment s’agissant de la constitution du stock stratégique en produits alimentaires, énergétiques et médicaux, de la mobilisation de 550 milliards de DH, de la création de 500.000 emplois durant la période 2022-2026 et de la mise en place d’une classe moyenne agricole.

D’autre part, M. Sentissi a souligné que le projet de loi de finances 2025 comporte des chiffres et des indicateurs irréalisables, s’agissant des taux de croissance, d’inflation, de déficit budgétaire et d’endettement, précisant que « comme ses précédents, ce projet de loi de finances ne contient rien de nouveau en dehors des équations fiscales qui pointent les crises sans leur apporter de solutions radicales, car notre ambition, en tant que Groupe Haraki, est que le gouvernement présente, pendant ce qui reste de son mandat politique, un nouveau programme gouvernemental qui soit à la hauteur des défis et des enjeux de cette étape, au lieu de ce projet de loi de finances que nous considérons comme une initiative ordinaire dans un contexte extraordinaire ».
M. Sentissi a précisé que ces chiffres très optimistes ne répondent pas aux tensions sociales (enseignants, médecins, infirmières, avocats, greffiers, étudiants en médecins, …) ni à la grande échappée des jeunes, ni à la flambée des prix.

M. Sentissi a poursuivi en affirmant « quand nous disons que le gouvernement manque de sens social et sociétal, cela ne vous plait pas. Vous vous focalisez uniquement sur les chiffres et vous abordez les préoccupations des Marocains sous un angle purement comptable, et vous accusez l’opposition – comme certains le prétendent – de porter des lunettes noires quand il s’agit d’évaluer la situation actuelle, alors que le gouvernement et sa majorité semblent porter des lunettes épaisses qui ne font qu’amplifier l’autoglorification bien avant les réalisations ».
Par ailleurs, M. Sentissi a indiqué qu’il s’agit d’un projet de budget général qui ouvre les portes aux importations pour couvrir l’échec des plans sectoriels à garantir la sécurité alimentaire sans toutefois avoir le courage d’évaluer et de corriger ces plans, soulignant qu’il s’agit d’un budget comptable sans profondeur économique et sociale qui interagit avec les défis du pays ; un budget qui est le produit d’un gouvernement, que ce soit dans sa première ou sa deuxième mouture, qui persiste dans la recherche de solutions technocratiques à des dossiers et des questions ayant un caractère politique, sociale et territorial complexe, sans profondeur ni horizon politique.
M. Sentissi a souligné qu’il s’agit d’un projet de budget général émanant d’un gouvernement qui ne communique pas – d’ailleurs il le reconnaît – et n’a pas la capacité de communiquer ; un gouvernement sourd et têtu, qui privilégie le monologue, renie le Maroc des institutions, place la préoccupation électoraliste au-dessus de tout, voire au détriment d’un Maroc politique pluraliste, d’un Maroc démocratique et des droits de l’Homme, dont l’avenir et les biens sont répartis équitablement et selon le mérite entre tous les Marocains.

Concernant le chantier Royal de la protection sociale, dans la réalisation duquel est impliqué le parti du Mouvement Populaire, M. Sentissi a souligné que le gouvernement a placé les Marocains à la merci de l’indice et du risque de dépassement du seuil. A cet égard, il s’est interrogé sur les critères définissant la pauvreté selon le gouvernement et pourquoi le seuil de 9,72, s’interrogeant également sur l’impact des investissements sur l’emploi, d’autant plus que le Chef du gouvernement avait promis de consacrer la moitié restante du mandat du gouvernement à la question de l’emploi, en l’absence d’une vision et d’une stratégie pour atteindre cet objectif.

M. Sentissi a critiqué la recette du gouvernement en matière d’emploi privé, citant à cet égard des initiatives modestes, conjoncturelles et temporaires, telles que « Awrach », « Forsa » et « Intelaka». M. Sentissi a également évoqué le dossier des enseignants qui n’ont pas encore été intégrés dans le tableau des postes budgétaires, s’interrogeant sur la véracité de l’intégration effective des enseignants contractuels dans la fonction publique, tout en notant que la contractualisation s’étend pour couvrir le secteur de la santé de manière inversée, dans le sens où la personne intégrée au niveau central devient un contractuel au niveau régional.
M. Sentissi a s’est interrogé aussi au sujet du budget consacré à la recherche scientifique, qui demeure en dehors des priorités et n’est pas à la hauteur des aspirations, de la rétraction du gouvernement sur de nombreux engagements, tels que la création de noyaux universitaires, ainsi que sur le sort des pôles régionaux promis et de la loi-cadre de l’éducation et de la formation, et plus particulièrement de son article 57.
De plus, M. Sentissi a relevé l’incapacité du gouvernement à gérer le secteur de la santé, évoquant à cet égard son incapacité à résoudre le problème des Facultés de médecine et la tension persistante et s’interrogeant sur la recette du gouvernement pour pallier le déficit estimé à 34.000 médecins et 65.000 aides-soignants, sur la possibilité de déployer des réformes sans légiférer (code du travail, loi relative aux syndicats, loi sur la grève) et sur les lois retirées.
M. Sentissi a souligné qu’il s’agit d’un précédent dans l’histoire législative sous un gouvernement sans boussole législative (plan législatif), notant que les caisses de retraite sont au bord de la faillite et relevant la confusion gouvernementale (décision de fusionner la CNOPS et la CNSS et la rétraction sur cette décision sans en expliquer les raisons) et l’absence d’une réforme globale du système de compensation, tout en affirmant que le gouvernement a recouru à l’option la plus facile consistant à augmenter progressivement les prix (bonbonnes de gaz).

M. Sentissi a également interpellé le gouvernement au sujet des rôles des agences et le sort du dossier de la régionalisation, soulignant que la récurrence des tragédies et des catastrophes a mis à nu la vulnérabilité et l’absence du plus grand pilier du nouveau modèle de développement, à savoir la justice et l’équité territoriales.

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